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Page:Féval - Les Habits noirs, 1863, Tome II.djvu/104

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monde, fouillez l’univers, nulle part ailleurs que dans les ravins de la forêt parisienne vous ne trouverez ces végétations monstrueuses.

La lune tournait et mettait sa lumière sur la mièvre face du petit.

C’était un vieillard en miniature, et gentil pourtant. Dans les rides indécises de ce masque on devinait les rudiments d’un sourire à la Voltaire.

Comment poussent-elles ces créatures ? Les enfants scrupuleusement soignés meurent parfois, car Paris n’est pas une bonne nourrice ; mais ceux-là ne meurent jamais. Ils percent la terre sous le pied qui les devrait écraser. Ils ont la santé du champignon. S’il y avait la peste, ils en vivraient. Chance de mauvaise herbe !

La mauvaise herbe, entendons-nous bien, se compose de simples précieux et de fumier. — Que deviennent-ils, ces fils de l’impossible ?

C’est le mystère et c’est le hasard. À quoi peut servir une pareille trempe ? À tout. Leur berceau fut le vice, mais ils ont souffert. Aucune souffrance n’est perdue ici-bas, quand le patient a la force et le temps.

Parmi ces créatures, l’innombrable majorité n’a pas la force. Elles végètent, dures au mal, mais annihilées par le mal. C’est la litière de nos sociétés.

Mais d’autres… Ah ! ceux-là sont d’acier. Prenez garde ou découvrez-vous ; c’est solide pour nuire ou pour bien faire ; c’est intrépide ou c’est implacable ; cela inspire la terreur ou le respect. Les grands coquins ont cette origine, les ardents tribuns aussi, aussi les fiers poètes, aussi les magnanimes apôtres.

Sera-t-il Cartouche, cet avorton ? ou Robespierre ? ou Bernadotte ? ou Beaumarchais ? ou Vincent de Paul ?