Aller au contenu

Page:Féval - Les Habits noirs, 1863, Tome II.djvu/396

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Julie. D’un autre côté, ce mariage était la sauvegarde de Julie. Julie avait une fille. Elle aimait peut-être son nouveau mari…

— Vertuchoux ! cette raison-là m’aurait brûlé le sang, à moi !

— Il y a des chiens de Terre-Neuve, des prix Montyon… des imbéciles ! »

Certes, M. Lecoq n’était pas un imbécile ; il avait fait ses preuves comme comédien, mais à de certaines heures l’émotion victorieuse dompte les habitudes diplomatiques les plus invétérées.

Les paroles prononcées par M. Lecoq étaient bonnes et bien choisies pour dissimuler la suprême agitation qui le poignait. Seulement, il les prononçait mal et les tressaillements de ses muscles démentaient sa tranquille loquacité.

Sa voix chevrotait, pendant qu’il parlait trop ; il y avait en toute sa manière d’être depuis une minute environ une fièvre qui n’était plus celle de l’impatience, et, malgré l’obscurité impénétrable, une menace terrible se dégageait de lui.

Trois-Pattes semblait ne point percevoir ces signes d’une tempête prochaine. Il travaillait consciencieusement et toujours.

Mais pourquoi cette tempête menaçait-elle ?

Depuis une minute, le bras libre de M. Lecoq ne se fatiguait plus. Sa main robuste serrait toujours les reins de l’estropié, mais le sens de son effort avait changé, de telle sorte que cet effort devenait impuissant à soutenir Trois-Pattes. Cette transformation s’était opérée graduellement et de parti-pris. C’était une épreuve.

Et l’estropié qui n’était plus soutenu, l’estropié qui aurait dû s’affaisser sur ses jambes mortes, restait debout !