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Page:Fabre - Chroniques, 1877.djvu/193

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qu’aux cieux ; la fantaisie rirait à toutes les fenêtres, chanterait sur toutes les branches. On verrait partout l’esprit courir, et on ne le saisirait nulle part.

Chacun de nous, en quittant la vallée du St. Maurice pour un monde meilleur, laisserait son nom à un coin de forêt, à un endroit pittoresque. Dans cinquante ans, le voyageur ferait l’ascension du Mont-Cauchon, descendrait dans les souterrains découverts par Évanturel, pénétrerait jusqu’au fond des grottes cristallisées qu’éclairerait, comme une lampe ardente, la mémoire de Provencher.

— Vous voyez cet orme superbe, dirait le guide des voyageurs dans le St.-Maurice. Eh bien, c’est là que, par un beau soir d’été, Dunn, nonchalamment étendu sur l’herbe, improvisa ce passage sublime qui, inséré plus tard dans le douzième volume de ses œuvres complètes, créa une si vive sensation dans le monde des lettres et attroupe encore les lecteurs.

Cette vaste plaine où l’on voit tantôt une colline verdoyante, tantôt un ravin profond, ici un bouquet d’arbres, là-bas une prairie en fleurs, est l’image fidèle du talent de Carle Tom.

Ce ruisseau qui côtoie les bois en gazouillant, c’est Sulte ; ce lac tranquille, que l’on aperçoit sous l’ombrage, berça longtemps Renault ; cette fontaine dont les eaux minérales conservent au parti démocratique le peu de vigueur et de teint qui lui reste, coula en plein Journal de St-Hyacinthe ; ce torrent qui déborde et s’effondre tout à coup en une chute profonde, emporta un jour l’Union Nationale. Cette chaîne de montagnes, que les géographes ont appelée tour à tour l’Ordre, la Revue Canadienne et le Nouveau-Monde, élève jusqu’au haut des airs, jusque dans les cieux, le nom de Royal.

Mais je n’en finirais pas si je voulais énumérer tous les beaux sites qui porteraient avec orgueil les noms déjà célèbres de mes confrères.