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Page:Fabre - Chroniques, 1877.djvu/195

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J’ai rencontré, un jour, en Europe, un actionnaire du Grand-Tronc ; il portait assez bien son malheur. Il me dit qu’il ne regretterait pas son argent perdu, si je lui assurais que les habitants du pays étaient pénétrés de reconnaissance à l’endroit de leurs bienfaiteurs d’outre-mer. Je ne crus pas devoir lui enlever cette dernière illusion, qu’il aurait échangée bien volontiers, du reste, pour le moindre dividende payé sur l’heure.

La conversation s’animant — nous étions à table, à Nantes

— il m’offrit ses actions pour un panier de champagne. Je le remerciai, en lui disant qu’il n’y avait plus de place dans ma malle. Il se paya de cette excuse banale.

La presse aurait bien vite fait revenir l’opinion publique de ses préventions contre les chemins de fer, si elle s’y mettait avec quelque ardeur. Mais il faudrait nous intéresser dans l’opération. Sans cela, nous continuerons à vanter par dessus tout le Philodonte du Dr. Pourtier.


Québec n’est plus que la seconde capitale du royaume. C’est à Ottawa, maintenant, que l’on fait rôtir les projets de loi. Tous les bons cordons bleus politiques du Canada y sont réunis, et le télégraphe nous transmet, chaque jour, un fort parfum s’échappant de la cuisine parlementaire. Avec le flair d’une ville qui a vu quarante sessions, nous devinons vite si le morceau est cuit à point et si la majorité arrive bientôt au degré de chaleur suffisant pour embraser le budget.

N’importe ! il nous plairait fort de voir les choses de plus près et de rôder, toute la journée, autour des fourneaux de l’État. L’air même est nourrissant en ce voisinage, et il peut arriver que, frappé de votre bonne mine, quelque haut personnage vous invite à la table du conseil.

Mes concitoyens québecquois avaient la bien douce habi-