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Page:Fabre - Chroniques, 1877.djvu/220

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les États-Unis ; que voyez-vous ? Le nombre de nos rivaux peut augmenter : nous ne diminuons pas. Nous ne pouvons à coup sûr fermer la porte à personne ; mais nous restons chez nous. Notre foyer s’agrandit, notre domaine s’étend ; et ce qui peut faire croire aux gens inattentifs que nous perdons du terrain, ce n’est pas que nous soyons moins, c’est qu’il y a plus du monde autour de nous. Qu’importe ! si nous nous tenons bien ensemble ; si nous sommes nombreux, unis et forts. Qu’importe ! que le chiffre des décès s’accroisse, si les naissances continuent régulières et innombrables !

Restez unis, je vous en prie ; fermez la porte à la division si chère à notre race. Ce qui nous affaiblit, ce n’est pas la jalousie des autres, c’est notre habitude de ne pas nous entendre, le besoin que nous ressentons de nous entre-déchirer, de nous prouver que nous sommes moins canadiens, ou bien moins catholiques, les uns que les autres. Je ne voudrais pas calomnier notre race et on me pardonnera du reste l’exagération de mon langage à cause de la bonne intention qui m’anime ; mais lorsqu’un Anglais ou un Irlandais voit un compatriote dans la détresse, son premier mouvement est de courir à son secours : souvent notre première pensée à nous est de nous dire : Si je le laissais se noyer pour le punir de ne pas nager dans les mêmes eaux que moi !

Ici, étant obligés de vous entr’aider pour maintenir votre position, vous êtes à l’abri de ces mauvaises pensées. Chassez-les toujours. Faites comme si, en toutes choses, vous aviez besoin les uns des autres : ne vous y trompez pas du reste : vous en avez toujours besoin ; et le compatriote que vous laisseriez tomber aujourd’hui est peut-être celui qui vous aurait aidé demain.

Mais je m’aperçois que je tourne au sermon : pour un. sénateur revenu des choses de ce monde, à l’abri des électeurs, c’est assez naturel, mais pour un libéral, c’est malséant. Vous