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Page:Fabre - Les Auxiliaires (1890).djvu/168

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RÉCITS DE L’ONCLE PAUL

large bande de la même couleur traverse par le milieu la poitrine et le ventre, et contourne les yeux, ornés d’une grande tache blanche. Les grosses plumes des ailes sont bordées de cendré-bleu.

La charbonnière est fort commune dans les taillis et les jardins. C’est elle qui, tout en inspectant les écorces des arbres fruitiers, répète en automne : titipu, titipu, titipu, et donne parfois à sa voix un grincement de lime qui lui a valu, dans quelques provinces, le nom de serrurier. Elle niche dans un trou d’arbre qu’elle garnit de matériaux doux et soyeux, de beaucoup de fines plumes principalement. La ponte est d’une quinzaine d’œufs blancs tachetés de rougeâtre clair, surtout vers le gros bout. Pour la subsistance de sa famille, il ne faut pas moins de trois cents chenilles par jour à la charbonnière, ou l’équivalent en tout genre de vermine. Ce que le jardinier, le pépiniériste, le forestier, doivent à cette vaillante échenilleuse est au bout de l’an incalculable. J’en ai vus pourtant plonger le bras, avec une sorte de rage, dans le tronc caverneux de vieux pommiers, pour en extraire le nid de la charbonnière, et jeter au vent, à pleine main, œufs, plumes, oisillons éclos d’un jour. Et ils croyaient faire œuvre méritoire, car, à leur dire, la charbonnière mange les bourgeons. — Mais non, répéterai-je, la mésange ne mange pas les bourgeons ; elle mange les petites larves logées entre leurs écailles, et elle est trop clairvoyante pour s’attaquer aux bourgeons sains, qui ne renferment rien de bon pour elle. Laissez-lui donc éplucher en paix les bourgeons véreux, qu’elle distingue très bien des autres.

Pour varier sa nourriture, la charbonnière ne dédaigne pas le chènevis et la noisette, dont elle extrait l’amande avec une habileté du bec et de la patte, je dirais presque de la main, qu’aucun autre oiseau ne possède. Le moineau, le pinson, le chardonneret et les autres concassent le chènevis entre leurs mandibules ; la charbonnière le saisit dans sa patte, le porte adroitement au bec et taille dans l’écorce une petite ouverture ronde par où le grain est vidé, comme nous le ferions d’un œuf à la coque. La noisette est travaillée avec la même dextérité.

La mésange bleue est un magnifique petit oiseau qui voyage de compagnie avec la charbonnière et fréquente les jardins fruitiers. Elle est olivâtre dessus, jaune dessous, avec le som-