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Page:Fabre - Souvenirs entomologiques, deuxième série, 1894.pdf/275

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dans le grès tendre et la marne, lui conviennent pour ses travaux ; mais les endroits préférés, ceux où se donnent rendez-vous les plus nombreux essaims, sont les nappes verticales exposées au midi, comme en présentent les talus des chemins profondément encaissés. Là, sur des étendues de plusieurs pas de longueur, la paroi est forée d’une multitude d’orifices qui donnent à la masse terreuse l’aspect de quelque énorme éponge. Ces trous arrondis semblent l’œuvre d’une tarière, tant ils sont réguliers. Chacun est l’entrée d’un corridor flexueux qui plonge à deux ou trois décimètres. Au fond sont distribuées les cellules. Si l’on veut assister aux travaux de l’industrieuse abeille, c’est dans la dernière quinzaine du mois de mai qu’il faut se rendre sur le chantier. On peut alors, mais à respectueuse distance si, novice encore, l’on redoute l’aiguillon, on peut contempler, dans toute son activité vertigineuse, le tumultueux et bourdonnant essaim, occupé à la construction et à l’approvisionnement des cellules.

C’est plus fréquemment pendant les mois d’août et de septembre, mois fortunés des vacances scolaires, que j’ai visité les talus habités par l’Anthophore. À cette époque, tout est silencieux dans le voisinage des nids ; les travaux sont depuis longtemps achevés et de nombreuses toiles d’araignées tapissent les recoins, ou s’enfoncent en tubes de soie dans les galeries de l’hyménoptère. N’abandonnons pas cependant à la hâte la cité naguère si populeuse, si animée et maintenant déserte. À quelques pouces de profondeur dans le sol, reposent, jusqu’au printemps prochain, des milliers de larves et de nymphes, enfermées dans leurs cellules d’argile. Des proies succulentes, incapables de défense,