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Page:Fabre d’Églantine - Le Philinte de Molière, 1878.djvu/25

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Dès le premier abord, deux hommes ont le droit
De se juger entre eux sur ce que chacun croit :
C’est l’usage, au surplus. Je sais ce que je pense ;
Et je n’arrache pas, monsieur, la confiance.

ALCESTE.

Vous me plaisez ainsi. Venons au fait. Exprès…

L’AVOCAT.

Avant de me mêler, monsieur, à vos secrets,
Apprenez-moi s’il faut, sans délai ni remise,
Dans quelque objet pressant prêter mon entremise ?

ALCESTE.

Dans ce jour, tout à l’heure, à l’instant.

L’AVOCAT.

Dans ce jour, tout à l’heure, à l’instant.Je ne puis
M’en charger.

ALCESTE.

M’en charger.Savez-vous en quel état je suis,
Monsieur ? Et pouvez-vous, dans une telle affaire,
Sans trahir les devoirs de votre ministère,
Me refuser les soins que j’implore de vous ?
C’est une iniquité.

L’AVOCAT.

C’est une iniquité.Calmez votre courroux ;
À de nouveaux devoirs chaque fois qu’on m’appelle,
J’y vole avec plaisir, je puis dire avec zèle ;
Et c’est pour le prouver que je me trouve ici.
Tous ceux que j’entreprends, je les remplis. Aussi
Quand l’esprit d’une affaire ou mon temps m’en éloignent,
Il n’est point de motif ni de lois qui m’enjoignent
De me charger, sans choix, de soins embarrassants,
Pour négliger alors les plus intéressants.

ALCESTE.

L’affaire qui me touche est pressée, importante ;
Arrivé cette nuit, je pars demain. L’attente
Peut être dangereuse.

L’AVOCAT.

Peut être dangereuse.Une même raison,
Dans deux heures au plus, m’appelle en ma maison.