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la danse macabre

Les lèvres obstinément closes
Semblèrent plus closes encor.

J’ai répété : — Monstre stupide
Qui tue sans savoir et sans voir,
Déclos ta bouche rose, avide
Comme un sexe d’épouse en fleur,
Ouvre l’enfer de ta mâchoire !
Mais nulle lèvre n’a frémi.

Et je plongeai comme en un rêve,
Hors de moi, tremblant, furieux,
Mes regards comme un double glaive
Jusqu’au fond des prunelles bleues :
Dis l’énigme après quoi je meurs,
Puis dévore-moi si tu veux !

Les clairs yeux sont restés stupides,
Et j’aperçus avec horreur
Que c’était rien que deux trous vides,
Les trous d’une tête de mort.

Et j’ai fui hagard et livide,
Blasphémant, pleurant tour à tour,
Pour n’avoir pu comme mes frères
Expirer d’angoisse et d’amour
Et me laisser tristement traire
Par le gouffre muet et sourd.

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