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Page:Falret - Études cliniques sur les maladies mentales et nerveuses, 1890.djvu/394

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n’offrent plus les symptômes physiques de la maladie, au moment où on les observe. Cette question touche à l’un des problèmes les plus ardus de la pathologie générale, c’est-à-dire à la transformation possible des maladies les unes dans les autres ; elle nous amènerait à envisager dans l’épilepsie la convulsion et le délire comme deux symptômes ou comme deux manifestations diverses d’un même état morbide. Cette question de doctrine ne peut être traitée ici incidemment, à l’occasion de quelques observations particulières ; nous nous sommes, du reste, imposé à cet égard une extrême réserve. Nous n’avons voulu nous appuyer, pour décrire les caractères du délire épileptique, que sur des faits d’épilepsie certaine, dans lesquels la relation entre le délire d’une part, les vertiges et les attaques convulsives d’autre part, ne pouvait être contestée par personne. Néanmoins, pour parcourir entièrement le cercle que nous nous sommes tracé, nous croyons devoir relater ici, sans réflexions, les trois observations suivantes, dont deux sont déjà consignées dans les annales de la science et dont la troisième nous est personnelle. Notre but est simplement d’attirer l’attention des observateurs sur ces faits singuliers, dans lesquels le délire paraît n’être qu’une transformation de l’épilepsie, qui a cessé de se produire depuis assez longtemps ; quelquefois même, elle reparaît de nouveau plus tard, et son retour coïncide alors avec la disparition du trouble mental.

Voici ces trois observations, bien dignes d’être méditées :

Observation XVI. — Un paysan, né à Krumbach, en Souabe, et de parents qui ne jouissaient pas de la meilleure santé, âgé de vingt-sept ans, célibataire, était sujet, depuis l’âge de huit ans, à de fréquents accès d’épilepsie. Depuis deux ans, sa maladie a changé de caractère, sans qu’on puisse en alléguer de raison ; au lieu d’accès d’épilepsie, cet homme se trouve depuis cette époque, attaqué d’un penchant irrésistible pour le meurtre. Il sent l’approche de son accès plusieurs heures, quelquefois un jour avant l’invasion ; du moment où il a ce pressentiment, il demande avec instances qu’on le garrotte, qu’on le charge de chaînes, pour l’empêcher de commettre un crime. « Lorsque cela me prend, dit-il, il faut que je tue, que j’étrangle, ne fût-ce qu’un enfant. » Son père et sa mère, que