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Page:Falret - Études cliniques sur les maladies mentales et nerveuses, 1890.djvu/463

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sur sa jambe droite et il remue son bras droit, mais il ne peut encore s’en servir pour écrire.

Avant de venir à l’Hôtel-Dieu, il avait eu dans un autre hôpital deux attaques éclamptiques, et, depuis son entrée, il en a éprouvé plusieurs autres.

Voici quelles sont ses manifestations intellectuelles. Quoi que nous lui disions, il répond invariablement par le mot couci-couci.

Nous avons essayé de l’habituer à répondre par oui et par non, mais c’est avec peine que nous parvenons à lui faire exécuter les mouvements de tête qui, dans toutes les langues, signifient oui et non. Il connaît certainement cette mimique naturelle, mais il est impuissant à l’exécuter d’une manière régulière. Sa main droite étant paralysée, il a appris à se servir de la main gauche. Nous lui disons d’écrire son nom et il trace en effet le mot Paqué qui est son nom véritable. Nous lui demandons d’écrire le mot cuiller et c’est encore le mot Paqué qui vient sous sa plume. La même chose arrive pour le mot fourchette. Nous lui disons qu’il est absurde. Il s’arrête étonné et confus, mais ne peut tracer sur le papier que des traits incompréhensibles. Cependant, lorsque nous lui avons demandé d’écrire le nom de sa femme, il a mis d’abord quelque temps à se le rappeler, mais, après avoir cherché, il a écrit Julie, qui est bien son véritable nom ; mais, quand on lui demanda ensuite d’écrire un autre mot, il continua d’écrire Julie, comme auparavant il écrivait Paqué.

Ayant appris qu’il connaissait le jeu de dames et de dominos, nous priâmes un de ses voisins de jouer aux dames avec lui, et non seulement il jouait bien et tendait des pièges à son adversaire, mais même on s’aperçut qu’il trichait au jeu ; on constata également qu’il jouait bien aux dominos.

Voilà donc un homme qui ne sait dire que son nom, qui ne sait pas ce que c’est qu’une cuiller, et qui exécute au jeu des calculs très multipliés.

Ce qui prouve pourtant le vague de ses idées, c’est que nous arrivons à lui faire indiquer par signes qu’une fourchette n’est pas autre chose qu’une tabatière, et qu’ayant cherché à l’exercer à la mimique, nous ne pouvons en obtenir de lui qu’une très insuffisante. Il ne peut donc exprimer convenablement sa pensée ni par la pa-