Page:Fauche - Le Mahâbhârata, tome 1.djvu/14

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pour qui n’existait pas l’impureté des mots, parce que l’impureté des choses était absente du cœur et de l’esprit.

Je n’ai point essayé d’envelopper ces nudités avec la gaze des paroles. Je me suis confié à ce langage d’une Revue, parlant de ma traduction du Çiçoupâla-badha :

« On ne tolérerait pas aujourd’hui ces détails ; mais c’est là précisément un trait caractéristique, dont le traducteur a bien fait de conserver l’empreinte ; car son livre s’adresse aux érudits plutôt qu’à la masse du public[1]. »

C’est une face des mœurs générales, que l’Europe n’a pas encore étudiée : il faut donc l’offrir aux yeux telle qu’elle est ici dans sa nature. D’ailleurs, l’entreprise de gazer est bien souvent une chose impossible. Comment, par exemple, gazeriez-vous ces détails singuliers de Vrihaspati, amoureux de sa belle-sœur enceinte, et de l’embryon, qui parle au Demi-dieu libertin dans le sein même de sa mère ?

Si vous ne donnez que des Extraits du Mahâ-bhârata sans doute vous n’admettrez pas dans la suave corbeille de votre Anthologie cette fleur primitive, incivilisée et dont notre odorat ne peut supporter la senteur âcre et pénétrante. Mais, si vous traduisez le poème dans tout son entier, il vous faudra bien aborder cette plante sauvage, la recueillir

  1. Revue critique des livres nouveaux, Mai, 1883.