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Page:Ferdinand Buisson - Sébastien Castellion - Tome 1.djvu/11

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plus délicate. Après tant de luttes stériles entre tant de sectes, il n’y a qu’un vaincu, c’est « l’intellectualisme » : de toutes parts — et le phénomène éclate bien au delà des limites du protestantisme — on a senti la sécheresse et sondé l’inanité des doctrines qui ne s’adressent qu’à l’intelligence et qui n’engagent qu’elle. On ne peut plus se nourrir de dogmes ni d’antidogmes : l’âme humaine demande à retourner aux sources vives, elle a soif de vie, elle s’aperçoit que de toutes les réalités les plus réelles sont celles qui se définissent le moins, elle veut rapprendre à aimer et à prier, à pleurer et à espérer, non pas suivant les règles d’un dogmatisme ou d’un positivisme quelconque, mais par cet élan du cœur et par ce sens du divin qui n’est que l’épanouissement du sens moral; elle se remet à la recherche du Dieu inconnu sentant trop ce qui manque au Dieu connu de chaque système; elle replace enfin au cœur de la religion le sentiment religieux qui en est l’essence. C’est précisément là toute la philosophie et toute la théologie de notre Castellion, elle n’est pas encore passée à l’état de lieu commun, et c’est pourquoi il n’est pas encore trop tard pour lui faire sa place dans nos annales.

Par la plus fortuite des coïncidences, le même jour et à la même heure où la Sorbonne voulait bien accueillir avec sympathie l’obscur antagoniste de Calvin, il était ailleurs bien plus présent encore. Une autre soutenance de thèse avait lieu devant la Faculté de théologie protestante de Paris et là ce n’était pas le nom de Castellion, c’était le plus pur de sa doctrine et de son esprit qui s’exprimait avec une rare puissance.

Plusieurs pages et les pages de doctrine capitales du travail original de M. le pasteur Léopold Monod sur le Problème de l’autorité rééditent avec une ressemblance