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Page:Ferdinand Genissieu - En prenant le thé (1868).pdf/236

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En prenant le thé.

Et comme je baissais la tête pour cacher mes larmes :

— Tu le vois, tu penses, comme moi, qu’il a froid, puisque tu pleures. Tu l’aimais bien, toi, je le savais… Et moi donc !

Sa voix, pour un instant, redevenait plus calme.

— Te souviens-tu de ce soir où nous étions dans l’avenue des tilleuls ? — Il jouait dans les feuilles mortes, et tu me racontais mon enfance. — Tu comprends, père, n’est-ce pas, tu comprends que je te parle de lui ?

Si je pouvais pleurer seulement !

Aurais-tu pu pleurer, toi, père, si j’étais morte ?

Moi, je ne peux pas ; tu sais pourtant que je l’aimais bien, dis !

Et la pauvre femme, dans son délire, répétait les mots favoris de l’enfant.

Pauvre enfant ! Qu’elle a dû souffrir !

Que lui dire pour la consoler ? — L’affreuse douleur qui l’accablait, je la sentais s’approcher de moi : je la voyais, la pauvre mère, s’épuiser, s’affaiblir d’instants en instants.