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l’ombre s’efface

Je voulus m’expliquer et je ne le pus. Ma gorge se serrait. Après quelques secondes, j’articulai :

— Ne soyez pas étonnée, ni émue. Préparez-vous à entendre un fait incroyable, un miracle, en quelque sorte…

Mme de Sesse eut un pressentiment et elle s’écria d’une voix assourdie, à peine distincte :

— M’apporteriez-vous des nouvelles de ma fille ?

— Précisément ! criai-je.

Elle était debout, mais l’émotion l’abattit sur un siège. Elle passa ses doigts sur ses yeux et balbutia :

— Est-ce possible ? Oh ! Christine, racontez vite !

Je lui narrai tout ce que je savais par Ursule, et celle-ci confirma mes dires.

Mme de Sesse avait joint les mains, mais, tout comme moi, elle fut déçue de ne pas savoir le nom de la nourrice, ni celui de la localité.

Alors j’intervins :

— Voici le passe-couloir rose, et voici le bracelet d’identité. Voici aussi un papier où se trouve le prénom de Christine…

— Mon Dieu ! gémissait Mme de Sesse, je crois devenir folle ! C’est moi qui ai inscrit le nom de ma fille !

— Ce papier m’a été donné par la femme Nébol chez qui j’étais en nourrice, et j’ai sur mon corps mon vaccin en forme de croix. Je suis votre Christine…

Mme de Sesse eut une exclamation rauque et s’évanouit. L’émotion était trop forte pour sa santé éprouvée.

J’étais atterrée et me figurais qu’elle était morte. Heureusement, Ursule était là et elle sut lui prodiguer des soins efficaces. Quand je la vis revenir à elle, je me précipitai à ses genoux en disant :

— Ma mère…

Elle me prit dans ses bras, et nous vécûmes des moments d’intense émotion.

Nous ne pensions plus à Ursule qui pleurait d’attendrissement. Mme de Sesse, l’apercevant soudain, lui parla avec bonté, l’assurant qu’elle s’occuperait d’elle, et lui dit de revenir le lendemain.

Nous restâmes seules, et les questions fusèrent de nos lèvres, et nos regards se posaient, enchantés, sur nos visages.