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Page:Fiel - Marane la passionnée, 1938.pdf/70

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marane la passionnée

Ma mère tenait sa tête entre ses mains.

— Ne sois pas si exaltée, murmura-t-elle enfin, et que cette histoire te serve de leçon.

Quelques jours passèrent, durant lesquels je ne sortis pas de la propriété. J’allais dans le parc, je courais avec mes chiens, je rentrais, je ressortais. Je lus un roman. Je le jugeai triste. Les fiancés ne savaient pas s’ils s’aimaient, et cela me parut invraisemblable. Il me semblait que, du moment que l’on désirait se marier, on devait savoir à quoi s’en tenir sur ce chapitre.

Pour la première fois, je réfléchis à l’idée de mariage.

Un jour, je demandai à maman :

— Me marierai-je ?

Comme de coutume, elle m’examina non sans un certain étonnement. Puis elle leva les mains et répliqua :

— Que puis-je savoir !

— Mais une mère doit savoir cela ! ripostai-je impatientée. Où trouverai-je un mari ?

— Tu me poses des questions auxquelles je ne puis répondre ; le destin, la Providence arrangeront les choses.

— Alors, il faut attendre ?

— Naturellement. Personne ne vient nous voir maintenant, et tu as tellement mal agi avec nos cousines qu’elles ne pourront plus être de quelque secours.

— Je suppose que tu ne comptais pas sur elles ! m’écriai-je suffoquée. Elles sont trois qui veulent se marier, et elles ne me céderont pas un de leurs soupirants. Et puis, pour le moment, je ne tiens nullement à me fiancer, non.

— Tant mieux !

— Mais quand je le voudrai, il faudra que mon mari me plaise. Je tiens à le trouver moi-même.

— Ma pauvre petite ! soupira maman.

— Je ne suis ni pauvre, ni petite, dis-je en me redressant.

Je quittai maman pour courir dans le parc.

J’abandonnai rapidement mes idées de mariage. Cette époque me paraissait lointaine, et elle ne retenait pas mon esprit.

Ce jour-là, je rencontrai la mère de Jean-Marie.

Il y avait une quinzaine de jours que s’était passé l’incident qui me le faisait détester.