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Page:Figuier - Les Merveilles de la science, 1867 - 1891, Tome 6.djvu/104

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L’appareil qui vient d’être décrit entraîne à un assez grand nombre de manipulations, qui peuvent être dangereuses. Pour simplifier l’opération on se sert, dans la même usine, d’un bac parcouru par des courants d’eau froide et d’air froid, pour modérer la réaction. L’eau circule dans un serpentin, l’air traverse un tube recourbé. Voici les dispositions de ce dernier appareil, que représente la figure 98.

C’est un bassin rectangulaire en bois et en plomb, à doubles parois latérales. Sa paroi supérieure est en verre, pour surveiller la réaction des matières, c’est-à-dire de la glycérine et de l’acide nitrique, que l’on y introduit, successivement, par le tube A. Deux thermomètres, b, b′, ayant leurs tiges à l’extérieur, servent à apprécier l’intensité de la réaction, en indiquant à chaque instant la température du mélange. Les gaz qui prennent naissance s’échappent au dehors, par le tube X.

Un courant d’eau froide circule entre les deux parois du bassin. Elle sort inférieurement par le robinet P. En outre, une circulation d’eau froide est constamment entretenue dans le mélange, au moyen du serpentin en plomb, B : l’eau arrivant d’un réservoir supérieur, par le tube C et s’écoulant à l’extérieur par le tube D.

Un courant d’air froid arrivant par le tube c c′ et sortant par le tube t concourt au refroidissement de la masse.

Quand la réaction est achevée la nitro-glycérine, plus légère que l’eau, surnage sur le mélange : on l’évacue par le tube à robinet R, et on la reçoit dans un bac plein d’eau froide. Le résidu liquide, composé de l’excès d’acide azotique et de glycérine, est évacué au moyen du robinet, qui termine le tube E. Le reste du liquide s’évacue par le robinet F.

Un tube indicateur de niveau, aa′, fait voir la quantité de liquide restant dans la cuve.

Chimiquement, la nitro-glycérine est une combinaison de glycérine et d’acide azotique. Au cours de sa préparation il se forme de l’eau : l’acide sulfurique n’intervient que pour absorber cette eau. La glycérine (C6H8O6) cède trois équivalents d’eau (H2O2) et s’assimile trois équivalents d’acide azotique.

La nitro-glycérine a l’aspect huileux ; elle est incolore, douée d’une odeur aromatique, et bout à + 185 degrés ; sa densité est de 1,64. Elle détone avec une extrême violence, sous l’action du choc, et brûle à l’air, sans faire explosion, ni produire de fumée.

« De tous les corps ou mélanges explosifs, usités, écrit M. Berthelot, c’est la nitro-glycérine qui fournit le plus grand volume gazeux, lors de son explosion. La roburite et la mélinite ne développent pas autant de gaz ni de chaleur que la nitro-glycérine. »

MM. Vieille et Sarrau, ingénieurs des poudres et salpêtres, ont estimé qu’un gramme de nitro-glycérine produit, en détonant, sept cent dix centimètres cubes de gaz, d’après la formule chimique suivante :

C6H2(AzHO2)3 = 3C2O + 5HO4 + 3Az + O.

La nitro-glycérine se décompose donc en acide carbonique (trois équivalents), eau (cinq équivalents), azote (trois équivalents), et oxygène (un équivalent).

On remarquera que les gaz qui se développent ne sont pas délétères, tandis que le coton-poudre, en faisant explosion, donne naissance à une certaine quantité d’oxyde de carbone, dont les propriétés toxiques ne sont que trop connues.

Quelques corps, parmi lesquels l’ozone, provoquent aussi, par leur simple contact, l’explosion de la nitro-glycérine.

La nitro-glycérine est tellement explosible, elle se décompose et détone avec tant de rapidité, et sous l’influence de causes si faibles et si insignifiantes, qu’il est à peu près impossible d’en faire usage avec sécurité, ni dans les mines ni dans les armées. Cependant, en usant de précautions exces-