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Page:Figuier - Les Merveilles de la science, 1867 - 1891, Tome 6.djvu/147

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avoir allumé les mèches, qui devaient faire détoner l’amorce des cartouches. Le rocher sautait, les six cartouches avaient fait explosion ; alors, les ouvriers revenaient et déblayaient le terrain.

On employa pour le percement du Saint-Gothard, qui fut fait en deux ans, 12 000 kilogrammes de dynamite. Si les ingénieurs n’avaient eu que la poudre ordinaire à leur disposition, il en aurait fallu 7 à 8 fois autant, et l’œuvre gigantesque qu’ils avaient entreprise ne serait peut-être pas encore terminée.

On employait 26 kilogrammes de dynamite par mètre d’avancement.

Le port de New-York était en partie barré, du côté de l’est, par un énorme banc de rochers, le rocher de Hallets-Point. À maintes reprises, des navires étaient venus s’échouer sur ce récif. En 1868, le gouvernement des États-Unis décida que cet obstacle serait détruit, et le général Newton fut choisi pour accomplir ce travail gigantesque.

Ce n’était pas chose facile ; le 24 septembre 1876 seulement, les travaux étaient terminés. On avait ouvert dans l’épaisseur du récif deux galeries, ayant, chacune, une longueur d’environ 100 mètres, une largeur de 7 mètres, et une hauteur de 5 mètres ; elles étaient reliées entre elles par des galeries transversales.

Les rochers de Hallets-Point avaient une superficie totale de 12 000 mètres carrés. On creusa 5 000 trous, qui furent remplis, de 40 000 kilogrammes de dynamite. Toutes ces charges furent réunies à l’aide de fils conducteurs, dont le développement total était de 70 kilomètres.

C’était la première fois qu’on faisait détoner en même temps une aussi énorme quantité de matières explosives.

Le général Newton, chargé de l’entreprise, ayant choisi une des plus grandes marées de l’année, les roches qu’il s’agissait de faire sauter étaient surmontées par une colonne d’eau de plus de 12 mètres. Aussi la hauteur du jet liquide fut-elle singulièrement atténuée. On estime que sa hauteur fut de 25 mètres et son diamètre de 100 mètres seulement (fig. 123).

Le reflux de l’eau vint mourir au pied du réduit casematé où le général Newton se tenait, avec sa fille, sa femme et quelques amis. Ce fut par la main de sa fille, enfant de deux ans, que le feu fut mis à la mine, par l’intermédiaire du commutateur que l’enfant fit agir.

La lame balaya le rivage, une seconde avant le bruit de l’explosion.

Quelques minutes après l’explosion, les vapeurs, les yachts, les canots, qui avaient été maintenus à distance par les embarcations de la police de New-York, se précipitaient dans la rade, encore encombrée de débris.

La vibration des terres environnantes avait été très faible. On n’observa pas de commotion atmosphérique ; ni le son ni la secousse ne se transmirent à un rayon de 5 milles de la mine.

Le déblayement des débris commença immédiatement après.

Un correspondant du Journal de Genève a fait le récit suivant de la journée du 24 septembre 1876.

« Quelle décharge allait faire cette pièce d’artillerie, à côté de laquelle les canons Krupp n’étaient qu’un misérable jouet d’enfant ? C’est ce que l’on se demandait à New-York. La foule avait pris position tout le long du rivage de la rivière de l’Est et sur toutes les éminences qui lui permettaient de jouir du spectacle auquel elle était venue assister. Les dernières heures avant le dénouement du drame furent employées à visiter les fils qui se rendaient du rocher à la station de décharge et à disposer la batterie électrique. Tout était prêt. Il ne restait plus qu’à appuyer sur un bouton pour mettre la batterie en communication avec les fils. Le général Newton avait auprès de lui une jeune enfant de deux ans et demi, sa fille. Son père prend sa main dans la sienne, l’approche de l’appareil électrique. Ainsi qu’il avait été annoncé, un coup de canon avait donné un premier signal, une sorte de garde à vous, à 2h,25 ; un second coup avait été tiré à 2h,40 ; un troisième à 2h,48′,30″.