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Page:Figuier - Les Merveilles de la science, 1867 - 1891, Tome 6.djvu/568

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foyer. Ces brûleurs étant composés de deux buses coniques emboîtées l’une dans l’autre, la vapeur de pétrole pénétrait dans la buse extérieure, et sortait de l’appareil, sous forme de nappe gazeuse, de 1 à 2 millimètres d’épaisseur.

Le pétrole arrive donc, en nappe circulaire gazeuse très mince, dans la buse ; là, il rencontre un jet de vapeur d’eau, qui le pulvérise, et le lance dans le foyer, sous forme de fine poussière.

Pendant les essais, qui durèrent cinq heures environ, les brûleurs fonctionnèrent avec une régularité parfaite. La pression à la chaudière se maintint toujours au maximum. Les chauffeurs, restés sur le pont, regardaient avec étonnement ces nouveaux engins, qui rendaient leur présence à bord à peu près inutile.

Pendant les manœuvres, et lorsqu’il fallut ralentir la marche, les ingénieurs de la Compagnie se rendirent maîtres de la pression avec une facilité surprenante. Il leur suffit d’éteindre un à un les brûleurs en fermant simplement le robinet d’arrivée du pétrole.

La consommation moyenne d’huile minérale, fut, pendant l’essai, de 115 kilogrammes d’huile minérale par heure : la consommation de charbon aurait été, dans les mêmes conditions, de 201 kilogrammes. Le pétrole a donc présenté un rendement supérieur de 74 pour 100 de celui du charbon.

Le pétrole employé comme agent de chauffage, a d’autres avantages dans la navigation maritime.

Une tonne de houille occuperait un volume presque double de celui qu’occupent 1 000 kilogrammes de pétrole. Il est donc possible d’augmenter ainsi la place destinée au fret.

Les incendies causés par la combustion spontanée du charbon, ne sont plus à craindre. Les arrimages à bord sont faciles : une simple pompe suffit. Même avantage, en ce qui concerne les chauffeurs, dont on peut diminuer le nombre, puisqu’une pompe actionnée par la machine, peut remplacer leur travail, qui se réduit à régler le débit du liquide.

Ajoutons que le pétrole étant exempt de soufre, ne saurait endommager les parois des chaudières, ni encrasser les tubes. Quand le tirage est bien réglé, le naphte ne laisse pas dégager au-dessus du navire, comme ceux qui sont chauffés au charbon, un long panache de fumée, qui, en temps de guerre, révèle leur présence. Avec le pétrole, il n’y a pas à piquer le combustible, pour faciliter la circulation de l’air dans les foyers : les brûleurs fonctionnent comme des becs de gaz. Enfin, il n’y a production ni de cendres ni de fumée, par sa combustion.

Les huiles minérales renfermant beaucoup d’hydrogène, leur combustion produit de la vapeur d’eau ; c’est pour cela que les lieux éclairés au gaz sont un peu humides, lorsqu’ils sont clos ; 1 kilogramme d’huile minérale engendre 4 350 grammes d’eau, en brûlant. On pourrait condenser cette vapeur, à sa sortie des fourneaux, et se servir de cette eau, pour alimenter la chaudière. Elle aurait la pureté de l’eau distillée, et ne donnerait lieu à aucune incrustation, ni à aucun dépôt.

Voilà bien des conditions avantageuses pour l’emploi du nouveau combustible.

Mais la supériorité du pétrole, comme agent de chauffage, réside surtout dans sa haute puissance calorifique. L’expérience a démontré que cette puissance est presque le double de celle du charbon : avec 65 kilogrammes de pétrole, on produit autant de vapeur qu’avec 100 kilogrammes de charbon.

On savait déjà, d’après des expériences anciennes de Sainte-Claire Deville, qu’un kilogramme de pétrole fait évaporer 15 kilogrammes d’eau, tandis que le charbon de Cardiff ne réduit en vapeur que 8 kilogrammes d’eau