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Page:Figuier - Les Merveilles de la science, 1867 - 1891, Tome 6.djvu/6

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vulgarisation de la photographie, devenue un instrument usuel pour l’artiste, et un délassement sans pareil pour l’oisif et l’amateur.

Cette méthode remplace aujourd’hui le dessin, dans une foule de cas. Les ingénieurs, les architectes, s’en servent pour le lever des plans topographiques, pour les projets de construction, les modèles de charpente et d’échafaudage, etc. Quand on construit une pile de pont, un navire, un appareil mécanique, une maison ou un édifice, il est plus commode de prendre, chaque semaine, la photographie de la situation actuelle du travail, que de dresser d’interminables états. Aucune infidélité n’est à craindre avec le dessin pris par l’instrument optique et chimique.

Dans les travaux de l’art militaire, les officiers du génie prennent, par la photographie, les levers de plans des fortifications et des constructions diverses, des ponts, des batteries, des pièces d’artillerie, etc. Ils peuvent en avoir plusieurs exemplaires, et les distribuer dans les ateliers, quand cela est nécessaire, le tout presque sans frais.

Aucun dessin de paysage ne se fait plus à la chambre claire, qui nécessitait tant d’adresse et d’application. La plus mauvaise photographie est préférable au plus habile croquis relevé à la chambre claire, instrument dont l’usage est même ignoré de la nouvelle génération d’artistes. On est trop heureux de pouvoir, par une opération de quelques minutes, conserver le souvenir des sites, des motifs de paysage ou de végétation, etc., pour s’inquiéter d’une autre méthode.

Les industries de l’ameublement, c’est-à-dire les ébénistes, les tapissiers, qui faisaient exécuter autrefois des gravures très coûteuses, pour faire connaître à leurs clients les modèles de meubles, tapis, décorations, étoffes, etc., réalisent une économie considérable en faisant photographier leurs ouvrages. Il n’est pas jusqu’aux modistes et couturières qui n’aient recours à ce moyen, pour faire connaître leurs costumes.

Enfin, le touriste et le voyageur résistent bien difficilement aujourd’hui au désir de fixer, par une opération commode et rapide, le souvenir de ce qu’ils ont vu.

La photographie est donc entrée maintenant dans le domaine public ; elle est devenue comme une nécessité du temps. La profession de photographe a ainsi perdu de son privilège : elle peut être exercée par tout le monde, sauf, hâtons-nous de le dire, l’habileté spéciale que quelques opérateurs doivent à la pratique assidue de leur art, et au sentiment artistique qui leur appartient, et justifie leurs succès.

Dans le Supplément que l’on va lire, et qui a pour but de faire connaître les progrès de tout genre réalisés par l’invention de Daguerre et de Niepce, depuis 1870, environ, jusqu’au moment présent, nous nous attacherons à décrire, avec exactitude, tous les procédés aujourd’hui en usage dans les ateliers, pour l’exécution de l’art multiple qui nous occupe.

Nous commencerons par la description du procédé au gélatino-bromure d’argent, qui a été la cause déterminante de la diffusion générale de la photographie dans les masses. Et comme ce procédé a conduit à créer un matériel particulier, tant pour l’obtention de l’épreuve négative, que pour le tirage des positifs, nous aurons à décrire les procédés nouveaux de tirage des épreuves positives, c’est-à-dire le tirage au charbon, au sel de fer et au sel de platine.

Les applications de la photographie, déjà si nombreuses, se sont singulièrement accrues dans ces dernières années. L’exposé de ces nouvelles applications nous permettra d’initier nos lecteurs à bien des faits