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Page:Figuier - Les Merveilles de la science, 1867 - 1891, Tome 6.djvu/662

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produire les vibrations sonores. On voit, en un mot, les forces physiques se remplacer, se suppléer l’une l’autre ; ce qui amène à conclure, par des faits indiscutables, à l’identité de toutes ces forces, c’est-à-dire à ce que l’on a appelé, avec raison, l’unité des forces physiques.

En raison de leur siège, qui se trouve dans l’intimité des molécules et en raison du peu de temps qui s’est écoulé depuis qu’ils se sont révélés aux savants, ces phénomènes électriques et électro-magnétiques, ces effets d’induction, ces vibrations moléculaires, sont souvent difficiles à expliquer par les lois actuellement connues dans la science. Il est donc sage de ne pas faire encore trop de théorie, de ne pas se presser de chercher des explications. Ce qu’il importe, c’est d’enregistrer les faits acquis, surtout quand ils se traduisent par la construction d’instruments de physique.

Tel est le cas du photophone de M. Graham Bell, dont la théorie physique est difficile à donner, et qu’il faut pour le moment se borner à faire connaître dans ses dispositions et dans ses effets. C’est ce que nous allons faire.

Le mot photophone est formé de deux mots grecs : φῶς, lumière, et φωνή, voix. L’appareil auquel M. Graham Bell a donné ce nom, bien justifié, sert à transmettre les sons, et surtout ceux de la voix humaine, au moyen de la lumière. Les rayons lumineux sont le véhicule au moyen duquel le son se transmet à distance.

M. Graham Bell a trouvé le moyen de convertir les vibrations lumineuses en vibrations sonores. Il a mis en évidence ce grand fait, que les vibrations lumineuses produisent un son, quand elles sont suffisamment rapides.

Le principe général du photophone, l’instrument pratique dont la construction a été la conséquence de la découverte de ce fait fondamental, peut se résumer comme il suit.

Prenons un miroir concave, sur lequel tombe un rayon lumineux, et parlons derrière ce miroir ; la surface du miroir réfléchissant variera dans sa forme, sous l’influence des vibrations vocales, et le rayon incident variera d’intensité au point d’incidence, suivant que la courbure du miroir vibrant s’atténuera ou s’exagérera. Si maintenant on recueille à distance sur un miroir plan, le rayon réfléchi, on y percevra la trace de ces variations d’intensité, et, par des dispositions particulières de l’appareil récepteur, ces variations d’intensité pourront produire, à leur tour, des vibrations sonores, identiques aux vibrations vocales du départ. Les sons de la voix seront donc transmis à distance, sans aucun autre intermédiaire que le rayon lumineux.

Ainsi, tandis que le téléphone nécessite des conducteurs métalliques, pour joindre entre elles les deux stations en correspondance, dans le photophone le récepteur est tout à fait indépendant du transmetteur. Un faisceau de lumière traversant l’espace d’un poste à l’autre, sans rencontrer d’obstacle opaque, suffit pour produire l’effet cherché. Cette condition n’est même pas absolue ; car certaines substances qui forment écran n’empêchent pas toujours les communications verbales de s’établir par l’intermédiaire du rayon lumineux.

Le principe sur lequel est basé le photophone était connu depuis un certain temps. En 1873, M. Willoughby Smith avait constaté que le corps simple connu sous le nom de sélénium, et qui appartient à la famille chimique du soufre, présente une résistance bien plus faible au passage du courant électrique, lorsqu’il est exposé à la lumière que lorsqu’il est dans l’obscurité. En d’autres termes, M. Willoughby Smith avait découvert que le sélénium exposé au