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Page:Filion - À deux, 1937.djvu/163

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— Es-tu partie de Montréal pour venir me parler de cet homme ? Je m’étais promis trop de joie de ces jours où pour la première fois de ma vie, je t’aurais à moi toute seule. Alexandre Daubourge vient me discuter mon bonheur jusque par la bouche de mon enfant. Laure m’aimes-tu ?

— Maman, pouvez-vous demander si je vous aime. N’aurai-je pas pu aussi bien aller ailleurs que de venir ici. N’est-ce pas une preuve que je vous aime.

— Si tu m’aimes, tu ne peux l’aimer.

— Si fait, maman, dans le cœur des enfants il y a place pour un père et une mère, et il reste encore des trésors d’affection inutilisés qui se déversent sur les frères et les sœurs.

— Oui, quand le père et la mère sont unis, mais dans notre cas tu ne peux aimer l’un qu’au détriment de l’autre.

— Non, maman, il me suffit d’oublier le mal que l’un a fait à l’autre, de ne pas juger mes parents suivant le commandement du bon Dieu pour vous englober tous deux dans le même sentiment très doux.

— Tu ne vas toujours me demander d’aller te conduire dans cet antre où on t’apprendra à me détester.

— Je ne vous demande que d’oublier le mal, de pardonner et de me permettre d’aller voir mon père, comme je suis venue vers vous. Réfléchissez bien maman, vous n’avez pas le droit de me séparer de cette famille dont je fais partie. Je sais trop