Page:Flaubert - L’Éducation sentimentale éd. Conard.djvu/313

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d’Arnoux des choses plus urgentes, ne lui en avait même pas parlé.

— Eh bien, et Arnoux ? dit Frédéric.

Elle l’avait relancé vers lui. L’ancien marchand de tableaux n’avait que faire du portrait.

— Il soutient que ça appartient à Rosanette.

— En effet, c’est à elle.

— Comment ! c’est elle qui m’envoie vers vous ! répliqua Pellerin.

S’il eût cru à l’excellence de son œuvre, il n’eût pas songé, peut-être, à l’exploiter. Mais une somme (et une somme considérable) serait un démenti à la critique, un raffermissement pour lui-même. Frédéric, afin de s’en délivrer, s’enquit de ses conditions, courtoisement.

L’extravagance du chiffre le révolta, il répondit :

— Non, ah ! non !

— Vous êtes pourtant son amant, c’est vous qui m’avez fait la commande !

— J’ai été l’intermédiaire, permettez !

— Mais je ne peux pas rester avec ça sur les bras !

L’artiste s’emportait.

— Ah ! je ne vous croyais pas si cupide.

— Ni vous si avare ! Serviteur !

Il venait de partir que Sénécal se présenta.

Frédéric, troublé, eut un mouvement d’inquiétude.

— Qu’y a-t-il ?

Sénécal conta son histoire.

— Samedi, vers neuf heures, Mme Arnoux a reçu une lettre qui l’appelait à Paris ; comme personne, par hasard, ne se trouvait là pour aller à Creil chercher une voiture, elle avait envie de