Page:Flaubert - L’Éducation sentimentale (1891).djvu/464

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immobile, sommeillait ; les mèches des trois flambeaux s’allongeaient.

On entendit, pendant deux heures, le roulement sourd des charrettes défilant vers les Halles. Les carreaux blanchirent, un fiacre passa, puis une compagnie d’ânesses qui trottinaient sur le pavé, et des coups de marteau, des cris de vendeurs ambulants, des éclats de trompette ; tout déjà se confondait dans la grande voix de Paris qui s’éveille.

Frédéric se mit en courses. Il se transporta premièrement à la mairie pour faire la déclaration ; puis, quand le médecin des morts eut donné un certificat, il revint à la mairie dire quel cimetière la famille choisissait, et pour s’entendre avec le bureau des pompes funèbres.

L’employé exhiba un dessin et un programme, l’un indiquant les diverses classes d’enterrement, l’autre le détail complet du décor. Voulait-on un char avec galerie ou un char avec panaches, des tresses aux chevaux, des aigrettes aux valets, des initiales ou un blason, des lampes funèbres, un homme pour porter les honneurs, et combien de voitures ? Frédéric fut large ; Mme Dambreuse tenait à ne rien ménager.

Puis, il se rendit à l’église.

Le vicaire des convois commença par blâmer l’exploitation des pompes funèbres ; ainsi l’officier pour les pièces d’honneur était vraiment inutile ; beaucoup de cierges valait mieux ! On convint d’une messe basse relevée de musique. Frédéric signa ce qui était convenu, avec obligation solidaire de payer tous les frais.

Il alla ensuite à l’Hôtel de Ville pour l’achat du terrain. Une concession de deux mètres en longueur sur un de largeur, coûtait cinq cents francs. Etait-ce une concession mi-séculaire ou perpétuelle ?

— « Oh ! perpétuelle ! » dit Frédéric.

Il prenait la chose au sérieux, se donnait du mal. Dans la cour de l’hôtel, un marbrier l’attendait pour