Page:Flaubert - Par les champs et par les grèves.djvu/220

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a deux golfes à ses flancs, et rien n’est beau comme ces grandes pentes vertes dressées presque d’aplomb sur l’étendue bleue de la mer. Les collines se bombent à leur faîte, épatent leur base, se creusent à l’horizon dans un évasement élargi qui regagne les plateaux, et, avec la courbe gracieuse d’un plein cintre moresque, se relient l’une à l’autre, continuant ainsi, en le répétant sur chacune, la couleur de leur verdure et le mouvement de leurs terrains. À leurs pieds, les flots, poussés par le vent du large, pressaient leurs plis. Le soleil, frappant dessus, en faisait briller l’écume sous ses feux, les vagues miroitaient en étoiles d’argent et tout le reste était une immense surface unie dont on ne se rassasiait pas de contempler l’azur.

Sur les vallons on voyait passer les rayons du soleil. Un d’eux, abandonné déjà par lui, estompait plus vaguement la masse de ses bois et, sur un autre, une barre d’ombre large et noire s’avançait.

À mesure que nous descendions le sentier, et qu’ainsi nous nous rapprochions du niveau du rivage, les montagnes en face desquelles nous étions tout à l’heure semblaient devenir plus hautes, les golfes plus profonds ; la mer s’agrandissait. Laissant nos regards courir à l’aventure, nous marchions, sans prendre garde, et les cailloux chassés devant nous déroulaient vite et allaient se perdre dans les bouquets de broussailles, qui couvraient les bords du chemin.