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enfants (p. 333), le voile de Tanit (p. 99), la monstrueuse machine dévorante (p. 347), sont autant de tableaux ou de scènes qui, pour n’avoir aucune place dans le récit de Polybe, n’en possèdent pas moins leurs assises documentaires propres et ont été rattachées à l’ensemble par un lien de vraisemblance et de possibilité. L’écueil, en une pareille matière, était l’anachronisme : Flaubert y est tombé rarement et l’on peut dire que dans l’utilisation des sources éloignées et la reconstitution par approximation et par analogie, il a fait preuve d’une prudence et d’une habileté consommées.

Tout au plus trouvera-t-on qu’il a accueilli, avec une complaisance trop marquée, bien des récits étranges que les anciens eux-mêmes considéraient comme fabuleux ; mais l’âme de ces peuples plus qu’à demi barbares, où Carthage recrutait ses armées auxiliaires, était elle-même pleine de superstitions et de légendes. Dépouiller ce monde africain de ses erreurs et de ses folies, c’eût été, en quelque sorte, lui ravir une parcelle de sa vérité, le défigurer, le trahir.

Aussi bien, pour permettre au lecteur de poursuivre lui-même, et jusque dans les détails, l’analyse des procédés employés par l’écrivain, il nous a paru nécessaire de mettre toutes les pièces sous ses yeux. Nous faisons donc suivre Salammbô :

1o D’une traduction du récit de Polybe ; 2o Des notes documentaires trouvées parmi les papiers de Flaubert ; 3o D’un index, où nous avons indiqué, après le sens du mot, la source où Flaubert l’a puisé.



I. SOURCE PRINCIPALE.

POLYBE, Histoire générale, liv. I.

[Nous en rapprochons, en petits caractères, les passages de Salammbô qui en sont inspirés.]

La première guerre punique vient de prendre fin. Elle a eu pour théâtre la Sicile, dont Rome et Carthage se disputaient la possession. Elle s’est terminée, en 241 av. J.-C., par la défaite d’Hannon et d’Hamilcar, aux îles Ægates, après de sanglants combats contre les forces romaines, commandées par Lutatius. Un traité de paix réconcilia, provisoirement, les deux Républiques.

LXVI. Aussitôt le traité conclu, Hamilcar Barca conduisit à Lilybée les troupes cantonnées à Éryx (*) ; cela fait, il se démit du

(*) Cf. supra : Salammbô, page 1, ligne 5.