XI
es filles de la Gourdan ne couchaient
pas seules quand elles
n’avaient pas eu la bonne fortune
de retenir un galant. Elles
gagnaient alors leurs lits deux
à deux, et ces amies d’élection
dormaient enlacées après s’être
donné les marques d’une tendresse
plus vive. L’Achalandée n’avait pas de compagne,
car il était rare qu’elle demeurât sans personne. La
Boiteuse n’en avait pas non plus, parce que l’infirmité qui
lui attirait l’attention des connaisseurs la faisait mépriser
des femmes. Pourtant, quel cœur débordant d’amour
que celui de la Boiteuse, quel esprit de renoncement et de sacrifice !
— Va, je te la donne, avait dit la Gourdan en lui mettant la main de Raton dans la sienne. Et maintenant, allons nous coucher.
Elle avait remarqué qu’une sympathie réciproque