Aller au contenu

Page:Fleuret - Histoire de la bienheureuse Raton, fille de joie, 1931.djvu/347

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Chevalier à Mme la Duchesse qu’il avait dû réveiller. Ils traversèrent la nef, précédés de M. Rapenod faisant sonner sa hallebarde helvétique, et dans un grand remue-ménage de gens qui se pressaient pour admirer la nouvelle épouse du Sauveur. Impies pour la plupart, ils déploraient à mi-voix qu’elle fût si belle. Quelques-uns ne se gênaient pas pour assurer que M. le Duc avait pris du bon temps et qu’il avait eu bien raison. Ce fut tout juste s’il ne s’entendit pas interpeller par deux ou trois bons compagnons sur la poitrine desquels brillaient les Ordres de l’Europe. Un poing sur la hanche, l’autre sur la canne, et les pieds en équerre, ils le regardaient passer essayant de tenir son sérieux et ne trahissant sa coupable envie de rire que par un tic du coin de sa lèvre impérieuse.

Devant la porte conventuelle se pressaient les amies de Raton et les amies de ses amies. Elles n’avaient pas attendu, par préséance, que M. le Duc et Mme la Duchesse fussent sortis. L’abbé Lapin soutenait d’un côté la bonne nourrice qui ne se pouvait porter ; la Gourdan l’assistait de l’autre. Ces demoiselles tenaient leur mouchoir à la main, et la Boiteuse étouffait ses gémissements à la vue des deux rangs de moniales au visage voilé, à l’émouvante rigidité, qui lui allaient ravir sa chère compagne. Elle pensait se jeter à son cou. Mais Mme la Duchesse ouvrit les bras. Puis ce fut le tour de M. le