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Page:Florian - Fables, illustrations Adam, 1838.djvu/533

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poëme.

À Tobie aussitôt la lumière est ravie.
Sans se plaindre, adorant la main qui le châtie :
« Ô Dieu ! s’écria-t-il, tu daignes m’éprouver !
Je n’en murmure point, tu frappes pour sauver ;
Mes yeux, mes tristes yeux, privés de la lumière,
Ne pourront plus au ciel précéder ma prière ;
Vers le pauvre avec peine, hélas ! j’arriverai ;
Je ne le verrai plus, mais je le bénirai. »

Ses amis cependant, sa famille, sa femme,
Loin d’émousser les traits qui déchiraient son âme,
De porter sur ses maux le baume précieux
De la compassion, seul bien des malheureux,
Viennent lui reprocher jusqu’à sa bienfaisance.
« Où donc, lui disent-ils, est cette récompense
Qu’aux vertus, à l’aumône, accorde le Seigneur ? »
Le vieillard ne répond qu’en leur montrant son cœur :
Mais ce cœur, accablé de ces cruels reproches,
Fort contre le malheur, faible contre ses proches,
Désire le trépas et le demande au ciel.
Sa prière monta jusques à l’Éternel ;
L’ange du Dieu vivant descendit sur la terre.

Le vieillard, se croyant au bout de sa carrière,
Fait appeler son fils, son fils qui, jeune encor,
De l’aimable innocence a gardé le trésor,
Comme un autre Joseph nourri dans l’esclavage,
Et semblable à Joseph de mœurs et de visage,