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Page:Fontanes - Œuvres, tome 1.djvu/162

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LE JOUR DES MORTS.

D’un ami qui n’est plus la voix longtemps chérie
Me semble murmurer dans la feuille flétrie.
Aussi c’est dans ce temps où tout marche au cercueil,
Que la religion prend un habit de deuil ;
Elle en est plus auguste, et sa grandeur divine
Croît encore à l’aspect de ce monde en ruine.

 Aujourd’hui, ramenant un usage pieux,
Sa voix rouvrait l’asile où dorment nos aïeux.
Hélas ! ce souvenir frappe encore ma pensée.

 L’aurore paraissait : la cloche balancée,
Mêlant un son lugubre aux sifflements du nord,
Annonçait dans les airs la fête de la mort.
Vieillards, femmes, enfants, accouraient vers le temple
Là préside un mortel dont la voix et l’exemple
Maintiennent dans la paix ces heureuses tribus,
Un prêtre ami des lois et zélé sans abus,
Qui, peu jaloux d’un nom, d’une orgueilleuse mitre,
Aimé de son troupeau, ne veut point d’autre titre,
Et des apôtres saints fidèle imitateur,
A mérité comme eux ce doux nom de pasteur.
Jamais, dans ses discours, une fausse sagesse
Des fêtes du hameau n’attrista l’allégresse.
Il est pauvre, et nourrit le pauvre consolé.
Près du lit des vieillards quelquefois appelé,
Il accourt, et sa voix, pour calmer leur souffrance,
Fait descendre auprès d’eux la paisible espérance :
« Mon frère, de la mort ne craignez point les coups ;