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Page:Fontanes - Œuvres, tome 1.djvu/344

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LA MAISON RUSTIQUE.

Chacun a pris son rang et croit en liberté.
Aidons de tous nos soins leur enfance incertaine :
Que le fer autour d’eux quelquefois se promène ;
Qu’une herbe parasite, un importun gazon,
N’affame point l’arbuste en sa jeune saison.
Bientôt, développant ses branches vigoureuses,
Lui-même affamera ces herbes dangereuses
Qu’un sol trop abondant fit renaître à ses pieds.
Si pourtant il s’épuise en jets multipliés,
Émondons le feuillage, et connaissons d’avance
Le rameau fortuné qui promet l’abondance.

 Souvent, dans nos enclos, un jardinier sans art,
Sous l’imprudent acier qu’il promène au hasard,
Taille, abat, détruit tout, et, fier de son ouvrage,
Se croit sur d’enrichir le verger qu’il ravage.
Il part, et des bourgeons tout l’espoir disparaît ;
Le Scythe de la fable était moins indiscret.
Maudit soit le barbare ! Il faut qu’avec sagesse
Ce qu’on retranche au luxe ajoute à la richesse.

 Étudions la sève, observons ses détours ;
Qu’une savante main la dirige en son cours,
Et la force à monter dans la branche choisie
Où va d’un fruit plus doux s’épurer l’ambroisie.
Déjà, dans ses canaux que rouvre le printemps,
Le merveilleux fluide, enchainé trop longtemps,
Monte, descend, remonte et redescend encore,
Amollit d’un lait pur le bouton près d’éclore,
Et de la rude écorce endurcit tous les nœuds,