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Page:Fontanes - Œuvres, tome 1.djvu/36

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SUR M. DE FONTANES.

jours après, revenant chez d’Alembert, Fontanes rencontra Naigeon qui lui dit : « Il est mort, et il en était temps, car il aurait fait le plongeon. » Ces étranges paroles frappèrent vivement Fontanes et ranimèrent en lui les sentiments religieux que sa première éducation avait déposés dans son âme. Emporté par le tourbillon du monde, il avait une foi peu agissante, et pourtant une foi sincère. Souvent il répétait le vers d’Ovide, si bien traduit par Jean Racine :

« Je ne fais pas le bien que j’aime,
« Et je fais le mal que je hais.»

Il affectionnait particulièrement ceux de ses amis qui avaient le plus de religion. Il avait dit à Pie VII, dans l’audience publique de Fontainebleaux : « Toutes les pensées irréligieuses sont des pensées impolitiques ; tout attentat contre le christianisme est un attentat contre la société[1]. » — Lorsque l’abbé Duvoisin (depuis évêque de Nantes) publia, vers 1802, sa Démonstration évangélique, « Je conçois, nous disait Fontanes, qu’on puisse rester incrédule après avoir lu les Pensées de Pascal, mais non après avoir lu l’abbé Duroisin. » La Bible, qui lui a inspiré de si beaux vers, était son livre favori, surtout dans ses moments d’affliction et d’abattement : « On ne peut trouver, disait-il, quelques consolation que là. » Dès la première atteinte de la maladie qui l’emporta, madame de Fontanes donna l’ordre d’aller chercher le médecin : « Commencez, dit le malade, par aller chercher M. le curé ; » ce qui fut fait.

Fontanes était humain, compatissant, généreux, souvent jusqu’à la munificence. Il n’avait pas été toujours heureux, et ne l’avait point oublié. Il publiait lui-même les secours qu’il avait trouvés dans les appuis de sa première jeunesse. Il les

  1. Voyez l’excellente Histoire de Pie VII, par M. le chevalier Artaud, 2e édition, t. Ier, pages 496 et 507.