Page:Fontanes - Œuvres, tome 1.djvu/426

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
299
LA GRÈCE SAUVÉE.

Il nous guide à l’instant au toit de ses aïeux,
Vers ce palais antique orné de leur vaillance,
Et que n’a point encor profané l’opulence.
Il salue en entrant, pour la dernière fois,
Ses pénates d’argile adorés par vingt rois.
Auprès de ses enfants son épouse l’amène :
Ses enfants, aussi beaux que les frères d’Hélène,
Reposaient sur un lit de joncs entrelacés,
Et, sans trouble endormis, se tenaient embrassés.
Leur mère doucement de sa main les caresse,
Ils ne s’éveillent point : leur père avec tendresse
Contemplait leur repos, leur front pur et vermeil,
L’amitié qui les suit jusque dans le sommeil :
« Enfants, dormez, dit-il, goûtez un sort prospère,
« Chers enfants, quelque jour consolez votre mère,
« Je vous quitte : les Dieux ainsi l’ont ordonné,
« Je suis par un Oracle à la mort condamné ;
« Adieu, c’est pour jamais. » La reine pâlissante
À ce fatal adieu jette un cri d’épouvante ;
Mais soudain le héros ; « Arrête, que fais-tu ?
« Rappelle ton courage, affermis ta vertu ;
« Une immortelle gloire est le prix de ma vie :
« Si ton époux ne meurt, la Grèce est asservie. »

 La reine à l’instant même a repris sa fierté :
« Pars, dit-elle, arme-toi, sauve la liberté !
« J’aime encor moins tes jours que je n’aime ta gloire,
« Pars, les siècles aussi chériront ma mémoire. »
— « Ah ! je te reconnais, crie alors son époux,
« Amyclé, l’œil d’Hercule est attaché sur nous ;