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Page:Fontanes - Œuvres, tome 1.djvu/462

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LA GRÈCE SAUVÉE.

Le héraut a crié : « Profanes, loin d’ici !
« Thémistocle, on t’attend, la Déesse s’avance,
« Tes vœux sont exaucés : Peuple, faites silence ! »
Tout se tait et frémit : les flambeaux sont éteints ;
Une divine horreur a rempli les lieux saints,
Le tonnerre en grondant annonce l’Immortelle.
La redoutable Hécate a marché devant elle,
Et les échos du temple ont redoublé le bruit
De ses chiens aboyants qui hurlent dans la nuit.
C’est alors que brisant sa prison souterraine,
Couverte à tous les yeux d’un long voile d’ébène,
Proserpine revient des gouffres du trépas,
Et retrouve Cérès qui la serre en ses bras.
Tandis que s’accomplit l’invisible mystère,
Thémistocle, suivant un chemin solitaire,
Se dérobe à la foule, et dans l’ombre échappé,
Remplit le grand dessein dont il est occupé.
Un prêtre le conduit, tous deux marchent sans crainte.

 Non loin était un gouffre, un sombre labyrinthe,
Creusé dans les débris d’un mont déraciné
Qu’un antique volcan semble avoir calciné.
L’herbe meurt alentour ; des torrents de bitume
Sur ses bords quelquefois rejetaient leur écume :
Quelquefois mugissaient ses profonds soupiraux,
Et ce gouffre conduit aux gouffres infernaux.
Là, Pluton, si l’on croit les récits du vieil âge,
Enlevant Proserpine, et s’ouvrant un passage,
Descendit emporté par ces coursiers fougueux
Que l’ardent Phlégéton embrasait de ses feux.