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Page:Forbin - Souvenirs de la Sicile.djvu/170

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DE LA SICILE.

nos marins, en fixant le prix de la traversée. Un besoin de procès et de discussions fait le fond du caractère du peuple sicilien, dont la cupidité m’a fait regretter mille fois les Grecs, les Hébreux et les Arabes. Êtes-vous obligé de tirer de l’argent de votre poche, de le remuer dans votre main, chacun accourt ; un groupe étranger à vos affaires se forme, se grossit, vous presse, vous harcèle, et dévore des yeux la monnaie dont il ne peut pas s’emparer.

Poursuivi par cette triste pensée, je me rappelais, malgré moi, que cette île fut long-temps esclave, et je regrettais de trouver encore chez quelques-uns de ses habitans la trace de la chaîne qui fut traînée par leurs pères. Rien n’est plus insupportable que les louanges, les admirations improvisées et les continuelles attentions dont on vous poursuit en Sicile. Vingt personnes s’empressent à-la-fois pour que rien ne vous heurte, pour vous aider à descendre un escalier, pour chasser avec fureur une mouche qui court sur le collet de votre habit, ou un chien qui se trouve sur votre passage. Comme M.me de Sévigné prétendait que le langage des précieuses la jetait dans des grossièretés, l’obséquiosité