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Page:Forbin - Souvenirs de la Sicile.djvu/68

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DE LA SICILE.

font les autres, place dans sa bouche une petite boule de sel, qui lui suffit pour trois jours. » Le lieu où nous arrivions faisait plus d’impression sur nous que les histoires du bon religieux. Un escalier peu éclairé conduit dans une crypte souterraine, dans un long corridor carré, dont le pourtour est tapissé de squelettes à demi recouverts d’une peau tannée. Plusieurs de ces morts, vêtus d’une robe de moine, conservent quelque chose de leur physionomie. Leurs bras sont parfois dirigés en avant, parfois aussi placés le long du corps, ou croisés sur la poitrine. Au-dessous, dans des coffres couverts d’armoiries, sont les femmes, les jeunes personnes. J’y ai lu le nom d’une demoiselle de Vintimille, morte en 1819, âgée de dix-sept ans. Ici les rangs sont encore séparés ; un bourgeois sèche loin d’un signor, qui n’ose pas pourrir près d’un prince. Mon religieux, familiarisé avec ce spectacle, remettait à sa place tel mort qui s’en était dérangé. La propriété dont jouit ce lieu, de conserver à l’abri de la corruption les corps qu’on y dépose, est si surprenante, que de petits enfans paraissent encore jouer ensemble. Les âges sont réunis ;