Aller au contenu

Page:Fournier - Mon encrier (recueil posthume d'études et d'articles choisis dont deux inédits), Tome II, 1922.djvu/168

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
168
MON ENCRIER

recherches vous avez cru pouvoir en établir : si le français chez nous se porte si mal, c’est tout simplement qu’il est rongé par le barbarisme, le solécisme, le provincialisme, et, bien davantage encore, par l’anglicisme. Oui, je ne me trompe pas, c’est bien ainsi que vous entendez le problème, c’est bien ainsi que vous raisonnez, très sérieusement. « Et voilà comment il se fait que votre fille… »

Ô docteur, docteur de Montigny, que vous donnez de singulières consultations, et qu’il est heureux pour nos corps que vous borniez votre pratique aux maladies du langage ! Je vous vois un peu d’ici, au chevet d’un anémique ou d’un tuberculeux, par exemple :

— Mon ami, diriez-vous au premier, votre cas est très simple et je vois clairement ce qui en est : vous souffrez de vertiges et, peut-être plus encore, de mauvais teint. Mais soyez sans crainte : ce sont des affections qui se guérissent.

Et au second vous diriez :

— Ho ho ! mon bonhomme, vous n’avez pas mal fait de me faire appeler… D’abord vous êtes atteint de sueurs froides et de cent quatre degrés de fièvre. Bien vilaines maladies comme vous savez. Mais ce n’est pas tout : vous en avez encore une autre, et qui ne sera peut-être pas moins difficile à traiter : c’est la maigreur.

Je vous entends vous récrier ; mon hypo-