Aller au contenu

Page:Froissart - Poésies (1829).djvu/182

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
166
POÉSIES

Tout selonc ce que son sentement oevre,
Et que le droit procès de s’amour roevre
En vostre nom, ma dame, à qui tout donne,
Discretion presentement m’ordonne
À esmouvoir, qui bellement vous die
En quel point poet estre ma maladie ;
Et toutes fois, quoi que j’aie à souffrir,
Ne sçai comment porai ma bouche ouvrir
De vous monstrer mon desir et m’entente ;
Car pluiseurs fois m’avés esté présente.
Onques je n’oc puissance de mouvoir
Parolle, dont vous peuissiés savoir
Entierement comment Amours me mainne.
Mès je vous scai si sage et si humainne,
Si avisée et si très débonnaire,
Que ne me doi ne ne m’ose plus taire ;
Car Hardemens le voelt qui à soi tire,
Tout mon corage, et me scet moult bien dire ;
« Ta vie gist en moult belle aventure,
» Car ta dame est si douce créature,
» Que tu ne dois pas estre doubtieus
» De li monstrer comment son corps gentieus
» Te tire et trait en painne et en soussi »
Et quant à ce Hardemens me moet si,
Me vodrai très bonnement avancier,
Car il m’est vis que, se je puis lancier
Un doulc parler, et je vous troeve en point.
Ma besongne en sera en millour point
Dont, pour ouvrir une grant quantité
De mes secrés, et savoir s’en pité