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Page:Froissart - Poésies (1829).djvu/20

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VIE

sirs y laissait, et devint pour lui une source intarissable d’amusements.

Il ne faisait que sortir de l’école et avait à peine vingt ans, lorsqu’à la prière de son cher seigneur et maistre messire Robert de Namur, chevalier, seigneur de Beaufort, il entreprit d’écrire l’histoire des guerres de son temps, particulièrement de celles qui suivirent la bataille de Poitiers. Quatre ans après, étant allé en Angleterre, il en présenta une partie à la reine Philippe de Haynaut, femme d’Édouard III. Quelque jeune qu’il fût alors, il avait déjà fait des voyages dans les provinces les plus reculées de la France ; l’objet de celui qu’il fit en Angleterre, était de s’arracher au trouble d’une passion qui le tourmentait depuis long-temps. Elle s’alluma dans son cœur presque dès son enfance,

    Car au boire prens grant plaisir ;
    Aussi fai-je en beaus draps vestir,
    En vïande fresche et nouvelle,
    Quant à table m’en voi servir
    Mon esperit se renouvelle.
    Violettes en leurs saisons,
    Et roses blanches et vermeilles
    Voi volentiers, car c’est raisons ;
    Et chambres plainnes de candeilles.
    Jus et danses, et longes veilles,
    Et beaus lis pour li rafreschir,
    Et au couchier pour mieulx dormir
    Espices, clairet et rocelle ;
    En toutes ces choses véir
    Mon esperit se renouvelle.

    Ballade, à la p. 313 de ses poésies mss.