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Page:Froissart - Poésies (1829).djvu/23

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DE JEAN FROISSART.

put éteindre, et Froissart ayant éprouvé toute l’agitation qu’une première passion fait sentir, fut presque réduit au désespoir, quand il apprit que sa maîtresse était sur le point de se marier : l’excessive douleur dont il fut frappé, le rendit malade plus de trois mois. Il prit enfin le parti de voyager pour se distraire et pour rétablir sa santé. Comme il s’était mis en chemin avec plusieurs personnes, il fut obligé de s’observer pour cacher son trouble. Après deux jours de marche, pendant lesquels il n’avait cessé de faire des vers à l’honneur de sa dame, il arriva dans une ville que je crois être Calais[1], où il s’embarqua. Une tempête qui survint, et qui menaçait le vaisseau d’un prochain naufrage, ne fut pas capable de suspendre l’application avec laquelle il travaillait encore à un rondeau pour sa maîtresse ; la tempête était calmée, et le rondeau achevé, lorsqu’il se trouva sur une côte où l’on aime mieux, dit-il, la guerre que la paix, et où les estrangers sont très-bien venus ; il parle de

  1. Elle n’est désignée que par ces vers :

    Que nous venins à une ville
    Ou d’Avolés a plus de mille,
    Et illec nous meismes en mer.

    Calais est le port où Froissart s’embarqua lorsqu’il repassa depuis en Angleterre en 1395. Le non d’Avolés, suivant Froissart, liv. I., fut donné à ceux que Jacques d’Artevelle avait bannis des villes de Flandres, parce qu’ils étaient contraires à son parti.