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Page:Froissart - Poésies (1829).djvu/323

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DE JEAN FROISSART.

Qui forment nous resjoissoient !
La matinée ert clere et nette.
Nous venins à une espinette
Qui florie estoit toute blanche
Haulte bien le lonc d’une lance ;
Dessous faisoit joli et vert.
Bien fu qui dist : « Cils lieus ci sert
» Droitement pour lui reposer.
» Le desjun nous fault destourser. »
À la parolle s’acordan
Et le desjun là destoursan
Pastés, jambons, vins et viandes
Et venison bersée en landes.
Là ert ma dame souverainne.
N’estoit pas la fois premerainne
Que je ne l’osoie approcier.
Trop doubtoie le reprocier ;
Et encores tant qu’à ceste heure,
Se Jhesus me sault et honneure !
Je le regardoie en grant doubte ;
C’est drois que tels perils on doubte,
Car pour faire le soursalli
A-on moult tost souvent falli
À renom et à bonne grasce.
Tous quois me tins en celle espasce
Et parfis le pelerinage
Avecques celle dou linage
En grant solas et en grant joie ;
Encor tout le coer m’en resjoie
À toute heure qu’il m’en souvient.