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Page:Frondaie - L'Homme à l'Hispano - 1925.djvu/84

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L’HOMME À L’HISPANO

manquer. Chacun de ses mots, sans qu’elle en eût conscience, précisait pour lui l’impossibilité de leur bonheur qu’elle désirait :

— Le luxe est indispensable à tout. Je ne saurais pas m’en passer… J’ai une cousine qui est entrée au couvent. Elle vit… privée de tout ce qui est l’ornement de vivre. Je ne comprends pas.

Elle jouait, indifférente, avec son collier d’un million :

— Je ne médis pas du luxe qui est notre atmosphère naturelle… Mais je dis que certains êtres — presque tous ceux que j’ai connus — sont sans joie au milieu de la fortune. Eh bien, c’est insensé…

Dewalter, maintenant immobile, buvait avec le sourire, une coupe de champagne. La coupe… Peut-être la libation aux dieux ? Et, dans ses oreilles, entrait la ciguë. Stéphane continuait, bien assurée qu’il pensait comme elle et plus simple que jamais :

— La fortune, c’est beau. C’est… je ne sais pas… c’est la possibilité de tout… c’est l’art sans inquiétude, l’amour libre d’esprit… On est fou d’avoir tout cela et de ne pas en jouir. Vous, au contraire, comme moi, vous savez. Votre voiture, tenez, a je ne sais quoi de rare, de choisi. Vous êtes naturellement un dilettante ; je l’ai vu tout de suite… Et cette chose double, chez le même homme, ce frémissement auprès d’une femme, cet amour qui apparaît… : eh bien, oui, c’est très