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Page:Gabriel Ferry - Costal l'Indien, 1875.djvu/186

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Outre Costal et quatre rameurs, il y avait, dans le petit canot commandé par don Cornelio, cinq des costeños (habitants de la côte) de Galeana, onze hommes en tout.

Cette embarcation était la moins chargée, et, en cette qualité, elle marchait en tête et servait d’aviso à la modeste flottille. L’Indien zapotèque était à la barre, et, tout en gouvernant, il faisait remarquer au capitaine un spectacle que celui-ci voyait du reste fort bien tout seul : trois ou quatre grands requins qui apparaissaient de temps à autre dans le sillage lumineux tracé par la quille du canot.

« Tenez, dit Costal, vous voyez bien ces animaux, qui nous suivent avec tant d’obstination qu’ils semblent se douter que le canot qui nous porte est à moitié pourri, eh bien ! je voudrais que mon ami Pépé Gago fût l’un d’eux, et j’irais le poignarder à la face des autres.

— Vous pensez encore à ce drôle ? reprit don Cornelio.

— Plus que jamais, et je ne quitterais pas l’armée de Morelos, même à l’expiration de mon engagement, dans l’espoir seul qu’il prendra un jour ou l’autre le fort d’Acapulco, où est enfermé ce misérable traître. »

Lantejas ne prêtait pas pour le moment beaucoup d’attention à ce que disait l’Indien ; la crainte qu’il avait exprimée sur la solidité du canot le préoccupait plus que les projets de vengeance de Costal, et il désirait, malgré le danger de l’atterrissage, aborder au plus vite dans l’île de là Roqueta.

« Ce canot marche bien, lentement, répéta-t-il à plusieurs reprises.

— Vous êtes toujours pressé de vous battre, dit Costal en riant, et cependant nous devons aller moins vite à présent, car nous approchons de l’île. »

Un point noir semblait en effet flotter sur l’eau comme un oiseau de mer qui se repose un instant sur la vague