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Page:Gabriel Ferry - Costal l'Indien, 1875.djvu/249

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poursuivi, du bandit enfin qu’il pouvait saisir vivant et qu’il devait laisser échapper, le capitaine eut besoin d’un moment pour apaiser les passions impétueuses qui grondaient au fond de son cœur.

Mais, sans qu’il s’en aperçût, sa main crispée contenait violemment la bride de son cheval, ses éperons tourmentaient ses flancs, et l’animal, se dressant droit sur ses pieds de derrière, fut retomber d’un bond presque contre la porte de l’hacienda.

On eût dit que son cavalier voulait franchir l’obstacle qui le séparait du féroce guerillero. Le bandit ne put retenir un geste d’effroi.

« Ce que je veux à Arrayo, répondit enfin le capitaine, c’est de graver ses traits dans ma mémoire pour ne plus les méconnaître quand je le poursuivrai pour l’attacher vivant à la queue de mon cheval.

— Si c’est pour me dire de ces tendresses que vous m’appelez… »

Le bandit faisait mine de rentrer dans l’hacienda.

« Écoute, s’écria don Rafael, tu auras la vie sauve, je l’ai promis ; l’humanité me fait un devoir de t’épargner !

— Aussi ne vous en sais-je pas gré, capitaine !

— Ta reconnaissance serait un outrage ; mais si, dans le morceau de fange sanglante qui te sert de cœur il est quelque trace de bravoure, monte à cheval, prends les armes qu’il te plaira et sors seul de cette enceinte : je te défie à un combat à mort ! »

Le capitaine, en parlant ainsi, se dressait sur ses étriers, et la noblesse de sa contenance offrait un frappant contraste avec la contenance basse et féroce à la fois de l’homme qu’il défiait. L’outrage lancé par don Rafael le frappait en pleine face ; mais Arroyo ne se sentit que le courage de le dévorer.

« Bah ! vraiment ! dit-il en affectant de plaisanter ; cinquante contre un !

— J’engage ici solennellement, devant mes soldats,