Aller au contenu

Page:Gabriel Ferry - Costal l'Indien, 1875.djvu/317

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Sans savoir qu’il eût affaire aux soldats du guerillero qu’il avait juré d’exterminer, don Rafael n’était pas homme à souffrir de qui que ce fût une attaque aussi brusque et aussi discourtoise. On sait comment les deux agresseurs furent accueillis ; seulement, el Gaspacho avait un peu fardé la vérité dans son rapport.

L’un des deux avait eu l’épaule fracassée si près du cœur qu’il en était mort deux heures après, et, quant au second, avant de le jeter rudement à terre, le colonel avait pris la précaution préalable de lui plonger son poignard entre les deux épaules.

Bien qu’il se fût mis ainsi à l’abri de toute indiscrétion de la part de ces deux bandits, le colonel avait malheureusement donné l’alarme en déchargeant un de ses pistolets, et comme les assiégeants avaient reçu l’ordre de tenir, jour et nuit, sellés et bridés, un certain nombre de chevaux, une dizaine de cavaliers s’étaient jetés en selle en entendant le bruit de l’arme à feu.

Le colonel avait hésité un instant, indécis s’il continuerait sa route vers l’hacienda ou s’il rebrousserait chemin pour revenir lorsque la nuit serait plus obscure, et ce moment d’incertitude fut cause que les cavaliers, qui enfourchaient leurs chevaux pour s’élancer à sa poursuite, purent l’apercevoir, et l’un d’eux, nommé Pépé Lobos, le reconnut, malgré l’heure avancée du jour, à sa tournure et à sa taille d’abord, puis aux ronflements de son cheval.

La haine même qu’Arroyo avait conçue pour le colonel fut ce qui lui sauva la vie en cette occasion. Quelques coups de carabine auraient sans doute fini là ses aventures, si l’espoir d’une forte récompense, promise par le féroce guerillero à qui le lui amènerait vivant, n’eût engagé les cavaliers à essayer d’en courir la chance.

Le colonel, à leur aspect, avait pris chasse devant eux avec l’espoir fondé de trouver, au milieu des bois épais