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Page:Gabriel Ferry - Costal l'Indien, 1875.djvu/333

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bon vous semblera, et je souhaite même, ajouta-t-il en souriant, que vous puissiez arriver jusqu’à ce neveu avec le testament de son oncle. »

Puis il dit d’un ton mélancolique :

« J’ai si peu de raison de tenir à la vie que je pense comme vous : un peu plus tôt, un peu plus tard, qu’importe ? Seulement, reprit-il avec un retour subit de bonne humeur, je tiens essentiellement à n’être pas pendu.

— Merci de votre permission, seigneur cavalier, répondit le Zapote ; mais un mot encore avant de vous quitter : si vous m’en croyez, vous remonterez au sommet de cet arbre, où personne ne songera que vous pouvez être.

— Non pas, je serais comme le jaguar poursuivi par les chiens sans pouvoir me défendre, et je veux, comme disent les Indiens, envoyer avant moi le plus d’ennemis possible, pour me déblayer les terrains de chasse dans l’autre monde.

— Eh bien ! faites mieux, poursuivit le Zapote, marchez vers l’Ostuta. À la pointe méridionale de ce bois, sur les bords du fleuve et près du gué, il y a des fourrés de bambous fort épais, dans lesquels mon compère et moi nous aurions trouvé asile jusqu’au jugement dernier, s’il ne nous avait fallu aller à nos affaires ; si vous pouvez y arriver, vous êtes sauvé.

— Ah ! ceci est préférable, dit le colonel, quoique depuis trois jours je commence à être las de me cacher. Adieu donc et bonne chance ! »

Le Zapote et son compagnon, après s’être orientés, prirent la direction qui pouvait, par un assez large détour, les conduire vers la route de Huajapam, où le messager de Gertrudis, sans se douter qu’il se séparait du colonel lui-même, espérait toujours le trouver dans le camp des royalistes occupés à en faire le siége.

Quelques secondes après, l’épaisseur du bois les eut bientôt cachés aux yeux du colonel.