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Page:Gabriel Ferry - Costal l'Indien, 1875.djvu/431

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— Alors, continua Costal, je vais appeler mes dieux. »

En disant ces mots, l’Indien ramassa une pierre près de lui, et, s’avançant vers la colline, il en frappa fortement un des angles ; le coup retentit au loin semblable au bruit de l’airain. Onze fois encore il renouvela sa terrible évocation.

Des murmures vagues d’abord semblèrent répondre aux coups de la pierre sur le rocher ; puis bientôt, comme si Costal eût en effet possédé le don de faire entendre la voix terrible de Tlaloc, des hurlements affreux éclatèrent au milieu du silence ; c’étaient ceux qui avaient si fort effrayé le capitaine et les gens de don Mariano.

Clara fut en proie à la même terreur ; mais ce ne fut que pour un moment, car il s’écria d’une voix ferme :

« Sonnez encore, Costal, Tlaloc a répondu. »

L’Indien jeta sur Clara un regard scrutateur. La lune laissait voir la teinte grisâtre de son visage ; il était évident que le noir parlait sérieusement.

« Eh quoi ! dit le Zapotèque, êtes-vous donc assez peu familiarisé avec les mystères de nos forêts, pour confondre la voix d’un vil animal avec celle du dieu des montagnes ?

— Un animal hurler ainsi !

— Sans doute ; cette voix est effrayante, mais elle ne l’est que pour ceux qui ne connaissent pas l’animal qui la fait entendre : c’est un singe[1] que vous tueriez d’un coup de la cravache que vous avez laissée au pommeau de votre selle. Non, non, la voix de Tlaloc est autrement terrible.

— Eh bien ! j’en suis fâché, » répondit le nègre.

Bientôt la vue des cavaliers qui exploraient les alentours du lac allait donner un autre cours à leurs idées. Les bandits d’Arroyo venaient à peine de disparaître

  1. Le stentor ursinus.