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Page:Gabriel Ferry - Costal l'Indien, 1875.djvu/440

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d’hommes et de chevaux dont les ombres s’allongeaient démesurément sur le sable blanc de la plaine. Mais que se passait-il au milieu de ce groupe ? Une scène terrible, sans doute, à en juger par un effroyable cri qui se fit entendre, et dont l’hacendero frémit jusqu’au fond du cœur.

Était-ce don Rafael vaincu qui le poussait, ou exerçait-il lui-même un acte d’impitoyable justice contre le meurtrier de son père ?

Au moment où Arroyo se débattait sous le poids de son cheval, le colonel s’était jeté à bas du sien, et, le poignard aux dents, ses deux mains de fer saisirent celles du bandit, dont les muscles brisés s’agitaient en vain sous sa terrible étreinte. Il pesa sur sa poitrine de tout le poids de son genou, lourd comme un bloc de rocher qui serait tombé du Monapostiac. Arroyo, les bras en croix, succombant à la douleur, restait immobile, et la rage et la terreur se peignaient tour à tour sur tous ses traits.

« Qu’on garrotte cet homme ! » dit don Rafael.

En un clin d’œil, le lazo de l’un des cavaliers se replia dix fois autour des jambes et des bras du bandit terrassé.

« Bien, dit le colonel lorsque Arroyo n’eut plus la liberté de faire un mouvement, qu’on l’attache à la queue du Roncador. »

Quelque habitués que fussent les soldats espagnols aux terribles actes de vengeance qui suivaient presque toujours la victoire d’un côté comme de l’autre, ce ne fut qu’au milieu d’un profond silence qu’ils exécutèrent cet ordre.

Lorsque l’extrémité du lazo qui liait le bandit fut fortement attachée à la naissance de la queue du Roncador, qui semblait aussi refuser la sanglante besogne dont on le chargeait, le colonel se mit en selle.

Il jeta par derrière un regard de haine sur l’assassin