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Page:Gabriel Ferry - Costal l'Indien, 1875.djvu/66

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longs flocons de mousse espagnole que la brise balançait à leurs extrémités, les lianes pendantes qui s’y enroulaient en festons, effleuraient de temps en temps la courbe écumeuse que décrivait la cascade. Au milieu d’un nuage de vapeur, ces deux grands arbres aux barbes grises et flottantes étendaient leurs bras vigoureux et semblaient être des génies vieillis à la garde de ces eaux.

À cet endroit, les deux compagnons firent halte. Bien que ce fût de ce côté à peu près que le dernier rugissement du jaguar s’était fait entendre, le nègre paraissait plus rassuré que quelques instants auparavant. La crainte des bêtes féroces et celle des esprits de l’autre monde s’étaient effacées devant la cupidité.

« Maintenant, dit Costal, écoutez attentivement les instructions que je vais vous donner ; mais, avant tout, rappelez-vous bien que, si la Sirène aux cheveux tordus vous apparaît, si, à son aspect, vous sentez une terreur réelle succéder à ce premier frisson que l’homme le plus brave ne peut empêcher de passer sur sa chair en présence d’un génie qui se rend visible, vous êtes perdu.

— Bon ! répliqua le nègre, la connaissance d’une mine d’or vaut bien le risque de se faire tordre le cou ; parlez, je vous écoute. »

En disant ces mots, la contenance du nègre était, du moins en apparence, aussi ferme que celle de Costal lui-même. L’Indien et lui s’assirent sur l’un des bords du profond ravin au fond duquel la rivière reprend bientôt son cours paisible au milieu d’arbres touffus et presque impénétrables aux rayons du soleil.

Cependant, malgré l’abondante végétation des arbres et des lianes qui couvraient le ravin et y répandaient l’obscurité, si les deux chercheurs d’aventures n’eussent pas été si absorbés dans leur conversation, ils auraient pu voir ce qui se passait au fond de ce ravin. Presque à leurs pieds venait s’asseoir un homme, à l’endroit où