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Page:Gabriel Ferry - Costal l'Indien, 1875.djvu/83

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dialité qu’il n’en avait encore montré, il ne s’agit pas toujours d’être brave comme vous le semblez pour échapper à toute espèce de danger ; il faut encore être averti de ceux qu’on peut courir. »

Don Rafael Tres-Villas contint son cheval.

« Parlez, mon ami, dit-il ; je vous écoute et vous remercie d’avance.

— D’abord, continua Costal, pour gagner d’ici l’hacienda de las Palmas sans vous égarer, surtout sans vous amuser à faire des détours, ayez soin d’avoir toujours la lune à votre gauche, de façon que votre ombre se projette à votre droite un peu obliquement, juste comme vous vous trouvez dans ce moment-ci. Maintenant, ne vous arrêtez pour rien au monde avant d’être dans la maison de don Mariano Silva ; si vous rencontrez un ravin, un fossé, un ruisseau ou une colline, franchissez-les en ligne droite, sans chercher à les tourner. »

Il y avait tant de solennité et de précision dans la voix et les recommandations de l’Indien, que le dragon en fut frappé.

« Quel est donc l’effroyable danger qui me menace ? demanda-t-il en plaisantant.

— Un danger auprès duquel celui de tous les tigres qui peuvent hurler ou rugir dans ces savanes n’est qu’un jeu d’enfant : l’inondation, qui, avant une heure peut-être, va les couvrir de flots mugissants, fera de ces plaines une mer furieuse, dans laquelle rouleront pêle-mêle ces tigres eux-mêmes, malgré leur légèreté, à moins qu’un arbre ne puisse les sauver. L’arriero et ses mules, comme le pâtre et ses troupeaux, seront également engloutis, s’ils n’ont trouvé un asile à l’hacienda où vous vous rendez.

— J’aurai tout égard à vos recommandations, » dit l’officier, qui se souvint de l’étudiant abandonné à deux lieues de là.

Il raconta en quelques mots son histoire à l’Indien.